En tant que registrateure et chef de la direction de l’Ordre des travailleurs sociaux et des techniciens en travail social, je voudrais aujourd’hui faire une mise à jour quant aux récentes communications de l’Ordre sur le sujet du racisme envers les Noirs, les Autochtones et d’autres formes de racisme systémique, et voudrais en même temps clarifier notre rôle réglementaire et notre mandat de protection du public.
Au vu des récents événements, nous tenons d’abord à faire part de nos inquiétudes quant aux incidents impliquant l’utilisation de la force par la police au cours d’évaluations de santé mentale – incidents qui ont touché de manière disproportionnée les communautés autochtone, noire et autrement racisées, avec les conséquences tragiques que l’on sait.
Ce sont là des problèmes et enjeux extrêmement importants et préoccupants qui impactent directement le travail de nos membres.
La lettre ouverte aux régulateurs
Le 2 juillet 2020, j’ai reçu – en même temps que les registraires de l’Ordre des infirmières et infirmiers de l’Ontario, de l’Ordre des ergothérapeutes de l’Ontario, de l’Ordre des psychologues de l’Ontario, de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario et de l’Ordre des psychothérapeutes autorisés de l’Ontario – une lettre ouverte d’un nombre de personnes exprimant leur profonde inquiétude face à l’omission par les ordres de réglementation de se prononcer sur la question de la participation de la police aux évaluations de santé mentale.
La lettre exigeait que les ordres de réglementation publient une déclaration publique visant, entre autre choses, à ordonner à leurs membres de cesser immédiatement d’appeler le 911 pour des évaluations de santé mentale ou de sécurité.
La lettre exigeait aussi que les ordres de réglementation émettent un avis public à l’attention de la vice-première ministre et ministre de la Santé, du premier ministre de l’Ontario et de la solliciteure générale leur demandant instamment, dans l’intérêt de la sécurité publique, de prendre immédiatement des mesures pour réorienter le financement des services de police de l’Ontario vers des initiatives de santé communautaire.
L’Ordre s’est associé à l’Ordre des infirmières et infirmiers, l’Ordre des ergothérapeutes, l’Ordre des psychologues et l’Ordre des médecins et chirurgiens pour préparer une réponse conjointe qui a été envoyée le 13 juillet 2020. On peut obtenir une copie de la réponse directement sur notre site Web.
L’intervention de la police lors des évaluations de santé mentale et notre rôle en tant que régulateur
L’Ordre reconnaît que de profonds changements tant au niveau social que politique et institutionnel sont nécessaires pour combattre le racisme et d’autres formes d’oppression systémique. Nous reconnaissons que les Noirs, les Autochtones et d’autres communautés de couleur auprès desquelles travaillent nos membres respectifs sont plus hautement exposés à subir des préjudices de la part de la police.
L’Ordre doit continuer, face à ces enjeux importants, de se pencher et de réfléchir sur son rôle de régulateur – un rôle qui est distinct de celui d’une association professionnelle, dont le mandat inclut l’intervention revendicatrice.
Bien que le mandat de l’Ordre n’inclue pas l’intervention revendicatrice, nous avons un rôle essentiel en ce que nous offrons à nos membres des accompagnements, des conseils et des ressources pour qu’ils soient à même d’exercer leur jugement clinique et éthique avec justesse au moment de prendre des décisions au bénéfice des personnes, des familles et des collectivités auprès desquelles ils travaillent. Il s’agit notamment pour eux de prendre en compte les questions d’équité, de diversité et d’inclusion eu égard à la santé.
Le nouveau Plan stratégique de l’Ordre fait ressortir notre engagement à agir de front sur les difficiles et pressantes questions de diversité, d’équité et d’inclusion en ce qu’elles nous concernent dans notre rôle réglementaire, notre rôle de régulateur. La toute première priorité vise le racisme envers les Noirs et envers les Autochtones, mais aussi d’autres formes d’oppression systémique qui touchent, de manière disproportionnée, des communautés racisées.
S’en tenir à la pratique éthique et professionnelle
L’Ordre reconnaît aussi que ses professionnels du travail social jouent un rôle fondamental dans la poursuite du dialogue sur ces importantes questions de justice sociale et dans la promotion des changements qui s’imposent depuis très longtemps.
Le Principe II : Compétence et intégrité du Code de déontologie et manuel des normes d’exercice énonce que les membres de l’Ordre doivent promouvoir la justice sociale et bien comprendre les impacts que l’injustice sociale, la discrimination et des rapports de force inégaux ont sur leurs clients. L’article 2.2.9 stipule ceci :
Les membres de l’Ordre encouragent la justice sociale et prônent le changement social au nom de leurs clients. Les membres de l’Ordre sont bien informés au sujet de la diversité culturelle et ethnique, des formes d’injustice sociale comme la pauvreté, la discrimination et les déséquilibres de pouvoir qui existent dans la culture et affectent les clients, et ils y sont sensibles.
En ce qui concerne, plus précisément, les évaluations de santé mentale, nous conseillons à nos membres d’exercer leur jugement professionnel au moment d’appliquer les Normes d’exercice dans l’intérêt des personnes, des familles et des communautés qu’ils aident. Dans leur pratique, les membres s’appuient sur les Normes d’exercice, sur les lois applicables et sur leur jugement professionnel.
Il importe de noter que les Normes d’exercice de l’Ordre n’exigent pas explicitement que les membres appellent la police dans les situations de crise. Plutôt, il leur est demandé d’exercer leur jugement professionnel au moment de considérer :
- leurs obligations aux termes des lois sur la confidentialité et le respect de la vie privée, et d’autres lois;
- l’intérêt du client; et
- le large éventail d’options à leur disposition.
L’Ordre a développé la ressource ETHICS (ÉTHIQUE)-A : Outil de prise de décision éthique pour aider les membres dans leur examen des questions à résoudre et dans l’exercice de leur jugement professionnel face à des scénarios de pratique complexes et à des dilemmes éthiques.
Nos communications, nos ressources et autres matériels continueront d’accompagner nos membres dans l’exercice éthique et professionnel du travail social, et de refléter notre mandat de protection du public.
Je tiens à réaffirmer ici notre engagement à examiner notre rôle de régulateur et à y réfléchir pendant que nous nous attachons à respecter notre mandat de protection du public et à assurer la sécurité des clients et des collectivités que nos membres accompagnent.
Restez en santé.
Lise Betteridge, MTS, TSI
Registrateure et chef de la direction