Le pouvoir de la conversation en psychothérapie avec Roxanne Francis, MTS, TSI

Le pouvoir de la conversation en psychothérapie avec Roxanne Francis, MTS, TSI

Au dire de Roxanne Francis, MTS, TSI, le progrès en psychothérapie commence toujours par l’amorce d’une conversation. 

Travailleuse sociale inscrite, psychothérapeute reconnue et conférencière de renommée internationale, Roxanne transforme profondément depuis plus de 15 ans la vie d’innombrables personnes par le pouvoir de la conversation. Sa passion pour l’ouverture d’un dialogue est née des problèmes sociaux pressants, tels que le manque de ressources en santé mentale et le manque de représentation dans la profession. 

« C’est mon amour des gens qui m’a poussée vers le domaine du travail social, mais c’est aussi mon incapacité de tolérer l’injustice sociale », explique Roxanne. Je suis venue au Canada de la Jamaïque quand j’étais jeune adulte et chaque fois que je retournais en visite dans mon pays d’origine, je voyais l’absence d’un filet de sécurité sociale. J’ai commencé à me poser des questions et c’est comme ça que je me suis retrouvée dans cette profession. » 

UNE CARRIÈRE FONDÉE SUR DE SOLIDES ASSISES 

Roxanne a obtenu son baccalauréat en travail social à l’Université métropolitaine de Toronto en 2009 et sa maîtrise en travail social à l’Université de Toronto en 2010, avec spécialisation dans l’enfance et la famille. Avec le temps, à mesure que les structures et les systèmes sociaux entraînaient une montée de stress, d’anxiété et d’autres difficultés mentales, Roxanne a senti qu’elle avait le devoir d’ouvrir des portes de sortie vers le bien-être. En 2018, elle a fondé le cabinet Francis Psychotherapy & Consulting, où les clients de tous les antécédents et de tous les milieux peuvent recevoir un traitement raisonné et compatissant pour gérer leur clarté mentale. 

Avant de se lancer en pratique privée, Roxanne dit qu’il était essentiel pour elle d’acquérir les compétences nécessaires en travail social pour que ses conseils encouragent les clients à agir. 

« Avant de se lancer en pratique privée, il est essentiel que les travailleurs sociaux et les techniciens en travail social aient de la curiosité pour les gens et leur situation, dit-elle. Il faut comprendre qu’on ne peut pas examiner la vie de quelqu’un à partir d’un seul récit ou à partir de ce que l’on croit avoir appris ou avoir lu pendant notre formation académique, parce que le vécu des gens peut être complètement différent. » 

Roxanne explique que cela demande beaucoup de travail puisque la pratique privée n’est pas la même que la pratique dans une agence ou un organisme établi. Le nombre de professionnels qui se sont lancés en pratique privée a augmenté depuis la pandémie de COVID-19 et Roxanne souligne que les compétences, les connaissances et le jugement s’acquièrent avec le temps et l’expérience en dehors de la formation académique. 

« Ce n’est pas une manière facile de gagner de l’argent : c’est de l’entrepreneuriat, explique Roxanne. Il faut travailler fort pour que les clients viennent à nous et je pense que ceux et celles qui finissent l’université ou le collège doivent comprendre comment mener une entreprise. » 

LA SUPERVISION ET L’EXPÉRIENCE VÉCUE 

Roxanne souligne qu’il est important de recevoir de la supervision et d’établir des liens avec des professionnels chevronnés avant d’exercer en pratique privée. Elle dit que chacun a sa façon d’optimiser son apprentissage et la relation superviseur-personne supervisée. Après avoir été superviseure clinique agréée auprès de plus de 60 cliniciens, elle affirme qu’une approche personnalisée adaptée à chaque cas accomplit des progrès. « Certains superviseurs se contentent de faire des consultations de cas, mais à mon avis, le travail effectué dans un esprit holistique donne de meilleurs résultats. » 

« Si une personne supervisée a besoin de conseils pour savoir comment se dégager d’une situation difficile ou comment faire face à ses propres traumatismes, je lui donne de l’encouragement et un peu de thérapie non clinique pour lui permettre de résoudre ses préoccupations actuelles, qui peuvent aller du syndrome de l’imposteur jusqu’à l’atteinte d’un équilibre vie-travail sain. Nous parlons de travail clinique mais aussi des aspects non cliniques qui peuvent affecter le travail clinique, ce qui nous permet de nous éduquer tout en ayant du plaisir. » 

Le vécu de Roxanne a beaucoup guidé son travail, comme le démontre son enseignement à l’Université de Toronto à titre de professeure adjointe. Cet enseignement porte sur le racisme contre les Noirs, les traumatismes raciaux, le bien-être au travail et le bien-être des femmes, des intérêts qui découlent tous de son expérience personnelle. 

« Mon identité canadienne et mon identité jamaïcaine sont très importantes pour moi parce qu’elles ont chacune des particularités qui influent sur ma façon de superviser et d’exercer en pratique privée. Par exemple, je sais ce que c’est d’être une personne noire en ce pays, la lutte que provoque cette identité-là et l’intersectionnalité du fait d’être femme et immigrante racialisée. Si je rencontre des personnes dont la situation sociale est différente de la mienne, je m’ouvre à la possibilité d’apprendre d’elles et de leur offrir le soutien dont elles ont besoin parce que je suis très intéressée à apprendre des autres. »

Selon Roxanne, de nombreuses personnes supervisées qui sont racialisées et qui viennent de communautés historiquement marginalisées ont tendance à aller vers elle puisqu’elles se sentent bien représentées, mais de nombreux cliniciens non racialisés reçoivent aussi un soutien dans leur façon de faire. Roxane est d’avis qu’il est nécessaire de poser des questions sans crainte de jugement pour décortiquer les divers traumatismes et pour que les personnes supervisées soient prêtes à travailler avec tous les clients. 

« Dans mes fonctions de travailleuse sociale, un endroit imprégné d’ouverture comme celui-ci m’a énormément aidée, explique Roxanne. Cela montre que les gens peuvent obtenir de la thérapie après avoir travaillé avec quelqu’un qui les réconforte et les conseille; cette démarche renforce le lien entre nous. » 

ACCUEILLIR LE CHANGEMENT ET GARDER VIVANTE LA CURIOSITÉ 

Roxanne explique que la pandémie de COVID-19 en 2020 et les protestations sociales dues au meurtre de George Floyd ont posé de nouveaux défis aux professionnels du secteur, entre autres dans leur façon d’interagir avec les clients. Elle dit que ces circonstances ont créé de nouvelles possibilités d’interagir de manière réfléchie. « La montée de la pratique virtuelle a permis aux professionnels d’élargir leur clientèle et de réduire les obstacles. Ce changement montre également qu’il est essentiel d’avoir une ouverture d’esprit quand la clientèle est diversifiée parce que dans notre rôle de travailleur social [ou de technicien en travail social], nous devons nous adapter à sensibilités à la fois nombreuses et très différentes. » 

Roxanne met la prochaine génération de professionnels au défi de rester curieuse. Il est essentiel de rester ouvert à l’inconnu tout en étant préparé et de réseauter avec des professionnels ou des superviseurs établis, explique-t-elle. Par-dessus tout, le bien-être du client dépend du bien-être ressenti par le professionnel. 

« Je dis souvent qu’il faut tout d’abord prendre soin de soi. Demandez-vous comment vous vous sentez avant de vous lancer dans ce domaine. Vous avez un rôle tout à fait unique à jouer auprès des personnes qui se tournent vers vous pour vous demander conseil : il est extrêmement important que vous soyez dans un bon état d’esprit. » 

Nous remercions Roxanne de s’être entretenue avec nous et de nous faire part de son expérience. En guise de remerciement, l’Ordre a fait un don à l’organisme Refuge Youth Outreach Centre.